Fil d'Ariane
- Accueil
- Actualités
- Impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques
Impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques
COMMUNIQUE DE PRESSE - Dans le cadre du programme Ecophyto II+, les ministères en charge de la transition écologique, de l’agriculture et de la recherche ont confié en 2020 à INRAE et l’Ifremer le pilotage d’une expertise scientifique collective sur les impacts de ces produits sur la biodiversité et les services écosystémiques, depuis leurs zones d’épandage jusqu’au milieu marin, en France métropolitaine et en Outre-Mer. Les conclusions de cette expertise, présentées ce 5 mai lors d’un colloque public, confirment que l’ensemble des milieux terrestres, aquatiques et marins – notamment côtiers – sont contaminés par les produits phytopharmaceutiques. Des impacts directs et indirects de ces substances sont également avérés sur les écosystèmes et les populations d’organismes terrestres, aquatiques et marins. La contamination tend néanmoins à diminuer pour les substances interdites depuis plusieurs années.
Ces travaux mettent aussi en avant des besoins de recherche complémentaires pour mieux quantifier l’impact de ces produits sur l’environnement. Ils soulignent par ailleurs l’existence de plusieurs leviers, liés à la réglementation, aux pratiques d’utilisation des produits et à la structure des paysages agricoles, efficaces pour limiter cette contamination et ses impacts, tout en garantissant la protection des récoltes, alors même que les systèmes de production agricole ne recourant pas aux produits phytopharmaceutiques sont encore trop limités.
Comment a été faite l’étude ?
La mission s’est déroulée sur deux ans, pendant lesquels 46 experts de 19 organismes différents ont analysé plus de 4000 références scientifiques mondiales dans le but : d’analyser la robustesse des connaissances actuelles sur l’état de la contamination des milieux par les produits phytopharmaceutiques et leurs produits de transformation d’une part et leurs impacts sur les organismes vivants et les services écosystémiques qui en dépendent d’autre part.
Quels résultats ?
Les techniques d’identification des substances s’étant améliorées au fil des années avec un élargissement des substances surveillées, a permis d’obtenir un état des lieux plus précis et fin qu’auparavant. Cet état des lieux a montré «[…] une large contamination des écosystèmes par les produits phytopharmaceutiques, avec un pic de contamination dans les espaces agricoles – dans les sols, les petits cours d’eau et l’air – là où ils sont majoritairement appliqués. Cette contamination touche aussi les zones situées à distance des parcelles cultivées comme les milieux aquatiques et les sédiments, ceci jusqu’à des milieux reculés comme les zones proches des pôles et les grands fonds marins. […]L’exposition aux produits phytopharmaceutiques est avérée pour un large panel d’organismes et montre que la contamination se propage aussi parfois le long des réseaux trophiques.»
Quelles conséquences pour l’environnement ?
Ces produits sont à la fois directement et indirectement impliqués dans la disparition et la diminution d’insectes «utiles» à l’humain pour l’agriculture, comme par exemple les insectes pollinisateurs ou encore des prédateurs de ravageurs de cultures (insectes, oiseaux…).
Ils peuvent induir directement la mort des individus, ou transmettre des effets de génération en génération dans les populations d’individus, menant à leur déclin.
En termes d’effets indirects, ils impactent souvent les milieux de vie et les apports de nourriture (destructions des proies, des couverts végétaux…).
Les résultats au niveau de la mer et des océans sont plus mitigés. Des effets directs et indirects ont bien été mis en avant, comme par exemple la «sensibilité accrue des huîtres ou des dauphins à des virus». Cependant, les données manquent pour extrapoler ces effets à l’échelle des populations entières d’individus et donc, aucune conclusion n’est tirée sur l’impact sur la biodiversité.
«Ces produits agissent ici comme un facteur aggravant de l’état de santé des écosystèmes, classé au 4ème rang des facteurs directs pesant sur la nature à l’échelle mondiale, parmi les autres types de pollution, et devant les espèces exotiques envahissantes. La modification de l’utilisation des terres et des mers, l’exploitation directe des organismes, et les changements climatiques sont les trois premiers facteurs aux plus lourdes incidences sur la nature.»
Comment limiter ou atténuer les impacts des produits phytosanitaires ?
«La réglementation européenne de mise sur le marché et d’utilisation des produits phytopharmaceutiques est une des plus exigeantes au monde, notamment en termes d’évaluation des impacts des substances sur l’environnement.»
Malgré de nombreuses interdictions de mise sur le marché de produits, cela n’est pas suffisant. En effet, ces interdictions ciblent des produits seuls, sans prendre en compte les interdictions entre différents produits phytosanitaires, qui peuvent se révéler très néfastes pour l’environnement et notre santé.
De plus, le manque crucial de données de l’effet des phytosanitaires sur la biodiversité n’aide pas dans la compréhension des mécanismes de ces substances et pénalise la connaissance qui pourrait permettre d’interdire plus de ces substances.
Conclusion
«L’expertise confirme aussi que les modalités d’application des produits phytopharmaceutiques ainsi que certains aménagements paysagers (bandes enherbées, haies…) permettent de limiter la contamination de l’environnement et ses impacts. Le paysage est également un élément clé pour la préservation des habitats et des zones refuges pour la biodiversité. La littérature scientifique souligne que c’est une combinaison de différentes actions complémentaires à terre qui permet d’atténuer leur dispersion jusqu’à la mer et leurs impacts, sans les neutraliser totalement. Enfin, cette expertise scientifique identifie des besoins de connaissances sur les impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité marine et ultra-marine. Elle souligne également des besoins de recherche, sur des substances en particulier ou sur les produits de biocontrôle, sur leurs effets « cocktail » et les services qu’elles touchent, sur certains organismes, ou compartiments biologiques encore peu étudiés (amphibiens, reptiles, microbiotes…), pour mieux évaluer à l’avenir leurs impacts sur l’environnement.»
article en entier Synthèse entière