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[Conférence] Pesticides : quels impacts sur la santé ?
Le samedi 17 mai 2025, les associations environnementales Riverain Ensemble et Écoraison ont organisé une conférence-débat aux Mées autour d’un sujet d’actualité : les impacts des pesticides sur la santé. La rencontre, qui a rassemblé médecins, agriculteurs, militants et citoyens, a permis d’éclairer les conséquences sanitaires, sociales et environnementales de l’usage massif des produits phytosanitaires.
Une pollution invisible… mais bien réelle
L’alerte est venue d’une campagne d’analyse de cheveux menée dans le secteur du Castellet, révélant la présence de plus de 40 molécules de pesticides différentes chez les habitants. Un constat alarmant qui fait écho au silence des institutions.
Les pesticides, un fléau pour la santé publique
Le Docteur Collomb, médecin généraliste à la retraite et adhérent à France Nature Environnement PACA, a rappelé les dangers connus des pesticides, touchant à la fois riverains et travailleurs agricoles. Il souligne que le terme regroupe herbicides, fongicides et insecticides parmi lesquels le glyphosate et le chlordécone.
En France, 7000 tonnes de pesticides ont été utilisées en 2022. Leur diffusion est facilitée par de nouvelles pratiques comme l’épandage par drone, plus large et plus invasif que les méthodes traditionnelles. Le traitement par granulés contamine également les nappes phréatiques. Le phénomène est aggravé par la présence de PFAS, des « polluants éternels » que les stations d’épuration ne parviennent pas à éliminer.
Les conséquences sur la santé sont multiples : maladies neurodégénératives, AVC, cancers, troubles cognitifs, dépressions, endométriose, pathologies respiratoires ou cardiovasculaires. La maladie de Parkinson est particulièrement répandue chez les travailleurs viticoles. Le chlordécone, interdit mais persistant dans les sols antillais, est responsable de nombreux cas de cancer de la prostate en Martinique.
Le docteur Collomb souligne la difficulté du dépistage (non pris en charge par la CPAM) et rappelle l’existence du Fonds d’indemnisation des victimes des pesticides (FIVP). Mais il plaide avant tout pour une réforme structurelle : rotation des cultures, réglementation plus stricte au niveau européen, et soutien à l’agriculture biologique.
« Je ne suis ni optimiste, ni pessimiste, je suis déterminé », conclut-il en citant Hubert Reeves.

Des témoignages poignants
L’assistance a livré des témoignages bouleversants :
- Une mère de Villeneuve a raconté comment son fils, atteint d’une leucémie à 14 mois, a dû subir 2000 chimiothérapies. Elle vit à proximité de vergers traités tous les trois jours entre mars et septembre. Elle évoque sept cas de cancers d’enfants dans son entourage, dont deux sont décédés.
- Une ancienne riveraine a développé un cancer du poumon à 61 ans, sans antécédents à risque. Elle vivait à côté de champs de pommiers, où elle constatait des odeurs fortes, la disparition des abeilles, la mort de ses oliviers et la négligence des consignes d’épandage par vent fort.
- Une médecin retraitée, très impliquée dans une association santé à Manosque, a soigné de nombreux patients contaminés, notamment des ouvriers agricoles marocains. Lors des épandages aériens, ils devaient se réfugier dans des hangars… sans protection durable face aux produits en suspension.
Protéger l’eau : un enjeu crucial
Pierre Gottardi, président de FNE 04, a exposé les mécanismes de protection des captages d’eau potable. Trois périmètres sont définis autour de chaque point de captage, mais leur efficacité dépend du respect des règles et d’un suivi rigoureux. Or, les obstacles sont nombreux : manque de contrôles, absence d’indemnisation pour les propriétaires, dégradations naturelles.

L’agriculture biologique : une voie d’avenir ?
Pour M. Daumas, agriculteur bio depuis 1987, les pollutions accumulées dans les sols depuis les années 50 menacent même les cultures biologiques. Il dénonce le manque de soutien de l’État envers l’agriculture bio, alors même qu’elle représente une alternative crédible.
Des voix se sont élevées pour soutenir un changement de modèle agricole : des représentants de SOS Durance Vivante, de la Confédération Paysanne, et des citoyens engagés. Tous insistent sur l’urgence d’agir, de mieux former les jeunes en agriculture et d’accompagner les transitions.
Une mobilisation citoyenne indispensable
En conclusion, le maire des Mées a rappelé que la production de pommes reste centrale dans la région, mais qu’elle ne peut se faire au prix de la santé publique. Il a également appelé les citoyens à faire leur part, notamment dans l’entretien des espaces publics sans produits chimiques, en soulignant que les agents municipaux consacrent un temps considérable à arracher les herbes dans les rues.
Cette conférence a permis de dresser un tableau sans concession de la situation sanitaire et environnementale liée aux pesticides. Elle a surtout mis en lumière l’urgence d’un sursaut collectif. Pour reprendre les mots d’un intervenant : « Il est temps d’opérer une révolution dans nos pratiques, pour préserver la santé et la vie. »

Pour en savoir plus, écouter l’émission mensuelle de FNE 04 «un moment pour la terre» diffusée sur Fréquence Mistral qui revient sur les points clés de la conférence contre les pesticides avec Pierre Gottardi et Marion Chabanon : j’écoute !